J’ÉLÈVE À DIEU UNE ORAISON
Lorsque, accablée sous le fardeau de la vie
Je sens en moi un profond désespoir,
La douleur d’exister, cette vie illusoire,
M’indiquent pourtant, ô tyrannie,
Qu’il doit y avoir une raison!
Une raison qui donne à réfléchir,
Une raison pour naître et pour souffrir,
Une loi mystérieuse, impitoyable, dure
Une loi silencieuse, vigilante, sûre!
Lorsque la noirceur des âmes primitives
Fait défaillir mon espérance fugitive,
Lorsque le chemin rocailleux de la délivrance
Fait fléchir mes genoux, amère souffrance,
J’adresse à Dieu une oraison,
Je dis qu’il doit y avoir une raison!
Lorsque, meurtrie par l'orgueil et l’envie,
Je vois autour de moi la jalousie,
J’adresse à Dieu une plainte amère,
Je sens mon âme qui désespère!
Lorsque le chemin de la croix
Me dément toute joie,
Lorsque le fardeau de la souffrance
Tue en moi toute espérance,
J’élève vers le haut mon regard fatigué
Je scrute à l’horizon la vérité,
Je sonde en moi les labyrinthes insoupçonnés,
Je dis qu'il doit y avoir de la clarté...
Par-delà l’horreur que je vois,
Par-delà le martyre de la croix,
Par-delà l’absurdité humaine,
Par-delà une vie si sordide et si vaine!
Lorsque le ciel m’abandonne je crie,
Me révolte , me retourne contre lui!
Lorsque le ciel s’éloigne de moi,
Le monde devient sinistre et froid.
Mais je sens tout au fond de mon coeur
Que par-delà toutes accablantes noirceurs,
Il doit y avoir une raison,
J’élève à Dieu une oraison!
Et sondant le mystère profondément,
Je crie que le monde ment,
Qu’il cache une vérité différente,
Qu’il montre une vision d’épouvante,
Qu’il masque le Paradis
Qu'il le dénie,
Qu’il doit y avoir une raison
J’élève à Dieu une oraison!
Ghislaine Belaieff