LE VIVANT ,
L’HORLOGE
ET LA MORT
Le Vivant
Que ne t’en vas-tu mort terrifiante,
Que ne péris-tu, Parque repoussante?
Au dégoût que m’inspirent tes horreurs,
Seule la vie pure oppose sa fraîcheur!
Mort lourde qui étouffe tout sur terre,
Que ne t'évanouis-tu , ô misère...
L’Horloge
Mes aiguilles tournent inexorablement...
La Mort
Je règne sur la terre et tout se courbe et tout ploie
L’homme sans vertu a gagné mes lois.
L’orgueilleux terrestre qui commet le péché
Recueille de mon néant ce qu’il a désiré.
Et le noir séjour du néant m’appartient,
Par le vice et la corruption, je les tiens!
L’Horloge
Mes aiguilles tournent pendant ce temps...
Le Vivant
Tu les tiens, o certes, Parque hideuse,
Et tu les flattes, mort odieuse,
Mais l’Esprit pur tu ne le tiens pas.
Vaines sont tes douceurs hypocrites, et il s’en va
Le vivant s’envole par-dessus l’atmosphère
Fétide de la mort et tu n’es guère
La reine de l’univers!
La Mort
Que dit l’insensé qui te défie, ô mort?
Que sait-il de la vie, ici-bas, attaché?
Que parle-t-il de vie, de liberté...
Lui qui dans ce séjour est déjà mort?
L’horloge
L’heure tourne pour les morts et les vivants.
Le vivant
Dans ce séjour mortel, certes tu ne vois
La vie subtile et ne crois
Qu’à ta destruction sanguinaire,
Toi qui aimes tuer sur cette terre!
La Mort
Ils sont à mon service les tueurs,
Ils se couvrent toujours de déshonneur,
Et ils aiment mourir tour à tour,
Et ils mourront jusqu’au dernier jour...
Jusqu’au jour mystérieux,
Jusqu’au jour où depuis le s cieux
La Vie aura raison de moi...
Mais ce jour, nous n’y croyons pas!
L’Horloge
Tu n’y crois pas, mais les heures passent,
Les aiguille tournent, rien ne s’efface
Le Vivant
Tu n’y crois pas au jour mystérieux
Tu n’y crois pas aux anges des cieux
Tu n’y crois guère à la Vérité,
Tu n’y a jamais songé.
La Mort
De quoi me parles-tu, téméraire,
Qu’ y-a-t-il de vivant sur cette terre,
Tout meurt , tout se flétrit, tout périt
Et c’est mon règne éternel , cela suffit!
L’Horloge
Ton règne est éphémère
Regarde les hautes sphères
Le Vivant
Pauvre mort arrogante, tu n’y vois goutte
Et ton monde pourri me dégoûte!
Tu es privée de vie, toi la mort et tes serviteurs
Nous, les vivants, le savons et tes horreurs
Passeront quand l’horloge sonnera l’heure!
La Mort
L’heure, l’heure, quelle dérision!
Nous sommes et nous existions
Bien avant la Lumière
Et je suis reine de l’univers
Le Vivant
Combien de temps encore
Combien de temps, la mort?
L’Horloge
Les aiguilles tournent en silence
Ne les arrêtera aucune science
A la fin de mon parcours
Finis tous les discours
Je sonnerai le glas
Vivant tu le sauras
Mort tu succomberas!!